Budget 2025 : le premier budget de la « coalition pantoufles » éloigné des enjeux du quotidien

Retrouvez l'intervention de notre chef de groupe, Rodrigue Demeuse, sur le budget 2025 !

Publié le 24 déc 24

Des gouvernements qui se déchargent sur les communes 

Je veux d’abord commencer cette intervention par remercier Monsieur l’échevin et surtout l’ensemble du Service des Finances et son Directeur financier pour le travail réalisé dans la constitution de ce premier budget de la législature.

On sait que le contexte est difficile. Les autres niveaux de pouvoir ont fait le choix de définancer les communes, en les laissant faire le sale boulot à leur place. 

Pour le Fédéral, ce n’est pas neuf : ça fait longtemps que les zones de police, les pompiers, les pensions, ne sont pas financées à la hauteur des besoins. Et on va bientôt devoir assumer en plus les exclusions du chômage dans les CPAS.

Désormais, c’est la Région qui s’y met en supprimant le soutien en personnel au CPAS, en imposant des conditions intenables dans le Plan Oxygène (on en débattra tout à l’heure), en n’indexant pas les APE et en supprimant le pourcentage supplémentaire à l’indexation qui servait de refinancement au fonds des communes. Ca fait plus de 130.000 € en moins en 2025, avant même d’avoir mené la moindre politique.

Et là, je vous avoue que je ne peux pas m’empêcher de repenser à ces grands discours de campagne sur la sécurité, et de constater qu’une fois au pouvoir, les mêmes partis définancent les zones de police. A tous les simplismes qu’on entend sur la fin du chômage, alors qu’en réalité on renvoie juste la patate chaude aux CPAS.

Et sincèrement, je détesterais être à la place du directeur financier aujourd’hui, à devoir gérer les conséquences de ces politiques à la petite semaine ! Ce n’est plus Christophe Comblin, c’est Tom Cruise dans Mission Impossible.

Heureusement, cette année, il peut compter sur un peu plus de recettes à l’IPP et un peu moins de dépenses vers la zone de secours, ce qui donne une petite bouffée d’oxygène d’1 million d’euros. Mais il est vraiment temps que les autres niveaux de pouvoirs se ressaisissent et j’espère que tous ceux qui ont des relais ici autour de la table pourront y contribuer.

2 bonnes surprises pour commencer

Je l’ai dit lors de l’installation du conseil communal : nous serons une minorité toujours constructive. Et je veux donc d’abord souligner le positif et les bonnes surprises de ce budget.

Ca ne vous surprendra pas, je pense évidemment à la mise en place du système des voitures partagées. Enfin ! Après plus de 10 ans, on a une inscription budgétaire ! On n’osait plus y croire !

La demande est énorme chez les Hutois et je ne doute pas que le succès sera au rendez-vous. Le budget de 35.000€ prévu pour éponger un éventuel déficit nous semble d’ailleurs bien trop élevé quand on voit le succès du système dans toutes les villes où il est lancé, parfois bien plus petites que Huy. Je pense à Ciney, Neufchâteau, Eupen, Gembloux… Ca fonctionne du tonnerre ! Mais on pourra ajuster.

Est-ce que vous pouvez nous en dire plus sur le nombre de stations prévues et leur localisation ?

L’autre bonne surprise, c’est la désignation, à l’extraordinaire, d’un auteur de projet pour la création d’un schéma de développement communal. C’est un outil d’aménagement du territoire absolument indispensable pour en finir avec le far west immobilier ici à Huy, et protéger les quartiers d’une pression insupportable. C’est une des demandes qui revient le plus quand on rencontre les Hutois en porte-à-porte.

Et ça nous rend donc vraiment heureux de savoir que les choses vont enfin bouger. 

Avec juste un espoir : qu’on ne se contente pas simplement du strict minimum, parce qu’il s’agit d’une obligation de la Région wallonne. Mais qu’on se donne les moyens d’en faire une vraie réussite, c’est-à-dire que la réflexion soit la plus participative possible, en associant les citoyens de chaque quartier pour dessiner avec eux le futur aménagement de nos villages.

Des promesses de campagne déjà lointaines

Ce budget, il est particulièrement important puisque c’est le premier budget de la législature. Et donc le premier budget de cette nouvelle majorité.

Or, un budget, ce ne sont pas juste des chiffres et des tableaux. C’est la traduction d’une vision, d’un projet politique. 

On se réjouissait donc tout particulièrement de découvrir ce premier budget, censé marquer l’empreinte de la politique qui sera menée durant les six prochaines années.

A la veille du réveillon, on s’attendait à un feu d’artifice de projets, de politiques nouvelles, de concrétisation des nombreuses promesses de campagne.

Et là, on doit bien constater que les promesses de renouveau se sont aujourd’hui transformées en soirée pantoufles au coin du feu, bien loin d’affronter les vrais défis auxquels sont confrontés les Hutois.

Où est passée la Ville propre, la Ville sûre, la Ville dynamique qu’on nous avait promise ? Probablement au fond du tiroir de la majorité, à côté des pantoufles.

On nous avait promis un budget à l’équilibre. On se retrouve, dès ce premier budget, avec un déficit historique, uniquement apuré grâce au 1,2 million qu’on va déjà puiser dans les provisions. Sans ça, on aurait un déficit d’un million d’euros.

En fait, à ce rythme, ce n’est pas en pantoufle qu’on va finir, mais rapidement à pieds nus…

On nous avait promis une dette sous contrôle. Elle explose à nouveau. La charge annuelle - ce qu’on rembourse chaque année - a été multipliée par deux en deux ans (chaque année, chaque Hutois remboursera désormais 296€, contre 152€ en 2023).

On nous avait promis une professionnalisation de l’accueil touristique. Tout le monde s’accordait sur cette nécessité pendant la campagne. Mais la dotation à l’office du tourisme ne bouge pas d’1€ et reste toujours aussi faible, permettant à peine de payer les salaires des quelques employés. 

Aucune nouvelle initiative n’est prise pour mettre en valeur et rénover notre patrimoine (cf. Mme Kunsch : fort, musée…), pour développer le vélo comme attraction touristique.

On nous avait promis une Ville plus propre. On ne trouve pas de mesure réellement ambitieuse en la matière. Pas de toilettes publiques, pas de moyens pour des poubelles supplémentaires en Ville, ou pour renforcer sérieusement Huy Ville propre… 

Et la politique environnementale est réduite à peau de chagrin, avec le PCDN qui voit son budget divisé par 4 et le tourisme environnemental qui disparaît carrément.

Quant au défi climatique, aucune trace d’une quelconque prise de conscience réelle de l’urgence. On continue de traîner les pieds…

On nous avait promis une Ville plus sure. A part la confirmation des engagements précédents, on ne dégage pas de moyen neuf pour plus d’agents de quartier ou une plus grande police de proximité. Au contraire, on risque de devoir prendre des mesures contre-productives comme l’extinction de l’éclairage la nuit et le remplacement des policiers par des gardiens de la paix, comme on en reparlera avec la convention Oxygène.

Enfin, on nous avait promis 500.000 € pour enfin soutenir nos commerçants après les dernières années extrêmement difficiles. On leur en donne dix fois moins. 50.000 €, c’est un premier geste, mais c’est évidemment très largement inférieur à la promesse qui leur avait été faite. Si on veut mener de vraies politiques ambitieuses en matière de commerce, il faut s’en donner les moyens. 

Ce budget, c’est du surplace en chaussons : sans doute confortable pour le collège, mais plutôt inefficace pour les Hutois.

Adieu la participation citoyenne

Hutois à qui le collège refuse encore et toujours de faire réellement confiance, puisqu’il n’y a toujours aucune trace d’un quelconque budget citoyen participatif.

Et ça va même plus loin cette année, puisque les 2000€ qui devaient servir à couvrir les frais d’organisation d’un éventuel budget participatif sont cette fois carrément supprimés. 

Vous ne faites donc même plus semblant ! Ce n’est pas encore en 2025 qu’il y aura un budget citoyen, ni qu’on réfléchira à son organisation. 

Au moins ça simplifie les choses, puisque jusque-là, on se demandait comment les échevins allaient faire pour travailler sur la participation citoyenne avec la compétence explosée entre les « budgets participatifs » chez l’un, et la « participation citoyenne » chez l’autre. En ne faisant rien du tout, ça résout le problème.

C’est pourtant un enjeu absolument essentiel quand on voit la défiance plus grande que jamais dans le monde politique, et les 25% de votes blancs et d’abstention en octobre dernier…

En conclusion…

En octobre justement, des milliers de Hutois ont cru au sprint vers le changement. Ils se retrouvent aujourd’hui face à une majorité en robe de chambre et charentaises, et cherchent désespérément la concrétisation des promesses de campagne, les nouvelles politiques de proximité, au service des citoyens.

Tout ce à quoi ils ont droit, c’est au recyclage du budget de l’an dernier, avec quelques millions en moins à l’extraordinaire vu que les élections sont passées. Mais aucun changement réel, aucune impulsion nouvelle, ou presque. 

En bref, ce budget, il est à l’image de la coalition pantoufles : pas top pour les grandes ascensions de montagne, pour les grands défis auxquels la Ville est confrontée, juste suffisant pour rester tranquillou dans le canapé un dimanche de pluie.

Vous comprendrez donc qu’on en voudrait plus, que face à ces défis, on aimerait que vous enfiliez vos bottes de travail ! On reste disponibles pour vous en prêter, mais ce soir, on ne peut malheureusement pas soutenir ce budget.